L’isolement existentiel

par | 6 Août, 2024 | Uncategorized

Auteur inconnu

« Nous sommes tous des voyageurs solitaires dans ce monde, chacun portant son propre fardeau et cherchant son propre chemin. »

Définition de l’isolement existentiel

Selon Irvin Yalom, “C’est la solitude – non pas la solitude interpersonnelle (le fait d’être isolé par rapport à d’autres personnes), ni non plus la solitude intra-personnelle (être coupé, isolé de certaines parties de soi), mais une solitude fondamentale – une qui sous-tend les autres solitudes. C’est celle par laquelle nous nous sentons séparés de toutes les autres créatures et coupés du monde”.

Solitude intérieure

L’isolement est un sentiment douloureux et profond de solitude intérieure et de déconnexion des autres, du monde et même de soi-même. Ce sentiment découle de la conscience aiguë de “notre existence individuelle* ” et de “notre séparation fondamentale avec les autres* ”, malgré les interactions sociales apparentes. L’individu se sent isolé et étranger vis-à-vis des autres.

Selon Anais Nin, « L’isolement est l’une des formes les plus profondes de douleur. » Franz Kafka ajoute que « L’isolement n’est pas seulement l’absence des autres, c’est l’absence de soi. »

Sensation de vide

L’isolement existentiel peut être accompagné d’une sensation de vide, où l’individu ressent un manque de sens et de connexion profonde avec le monde qui l’entoure.

LES RAISONS DE NOTRE SENTIMENT D’ISOLEMENT

Notre séparation fondamentale avec les autres

Il existe une barrière existentielle, inhérente à notre condition humaine, qui nous sépare les uns des autres. Notre existence et notre expérience sont uniques et individuelles. Nous pouvons vivre des expériences similaires, cependant personne ne peut réellement vivre exactement la même existence qu’un autre. Le verbe « exister » implique la différenciation, « ex-sistere » signifie littéralement « se détacher », « surgir ». Le processus de croissance et de maturité est un processus de séparation visant à faire de chacun un être séparé.

Quête de sens personnelle

Cette existence individuelle est également liée à notre quête de sens profond et notre responsabilité personnelle. Chacun doit trouver son propre sens à la vie, ses propres valeurs et son propre but.

Mort individuelle

L’individualité de notre existence atteint son point culminant dans la mort. Chacun fait face à sa propre mortalité de manière individuelle. Personne d’autre ne peut mourir à notre place, et c’est dans cette confrontation à la mort que notre existence individuelle est la plus évidente.

Difficultés de communication

Malgré nos efforts pour communiquer avec les autres ou pour nous rapprocher de l’autre, il y a toujours un écart entre nos expériences intérieures et notre l’expression extérieure de notre expérience. Nous ne pouvons jamais partager entièrement notre monde intérieur avec autrui et saisir précisément ce que vit l’autre. Nous sommes seuls et isolés dans le vécu de notre expérience du monde. Ce fossé renforce notre individualité et notre sentiment d’isolement.

Confrontation aux questions essentielles

L’isolement se produit lorsque les individus réfléchissent profondément aux questions existentielles telles que le sens de la vie, la liberté et la responsabilité. Les valeurs matérielles et superficielles de la société peuvent sembler insignifiantes par rapport aux questions existentielles plus profondes.

Liberté et isolement

Devenir une personne implique un isolement complet, fondamental, éternel et insurmontable. Lorsque je manifeste ma liberté existentielle, j’engendre une conscience de mon isolement fondamental.

Montagnes brumeuses et sombres, ambiance mystérieuse

Auteur inconnu

« Nous sommes tous des voyageurs solitaires dans ce monde, chacun portant son propre fardeau et cherchant son propre chemin. »

Carl Gustav Jung

« La solitude est le prix que nous payons pour naître conscients. »

NOS STRATÉGIES D’ÉVITEMENT

La souffrance de l’isolement est difficilement supportable

Notre difficulté à affronter l’isolement existentiel explique pourquoi beaucoup de gens se détournent de leur démarche d’individuation préférant plutôt soulager leur sentiment de solitude par la fuite dans la mauvaise foi, la conformité, le divertissement, un engagement social excessif et la foi en un ordre divin (cf: publication Divertissement Pascalien”).

Erich Fromm, dans son livre intitulé « La peur de la liberté » est le premier à établir un lien intime entre l’isolement existentiel et la conformité : “[…] il adopte entièrement le genre de personnalité qui lui est offert par les modèles culturels; Et il devient donc exactement comme tous les autres sont et comme ils attendent qu’il soit. L’écart entre le «je» et le monde, disparaît et avec lui la crainte consciente de la solitude et de la vulnérabilité […]. La personne qui abandonne son individualité et devient un automate, identique à des millions d’autres automates autour d’elle, n’a plus à se sentir seule et angoissée. Mais le prix qu’elle paie, cependant, est élevé; C’est la perte d’elle-même.”

QUELLE DIFFÉRENCE ?

Le vide, l’angoisse, l’isolement

Le vide existentiel découle de l’absence de sens intrinsèque, l’angoisse existentielle émerge de la confrontation à la liberté et à la finitude, et l’isolement existentiel provient de la déconnexion avec les autres et de la réflexion sur les questions profondes de la vie. Ces concepts sont intrinsèquement liés et reflètent les défis de la condition humaine selon la perspective existentialiste. 

L’INVITATION

Invitation à l’exploration

L’isolement existentiel, se référant à « un fossé infranchissable entre soi-même et tout autre être », est donc une préoccupation fondamentale à laquelle chacun devra faire face au cours de son développement psychologique. L’isolement peut être perçu comme une opportunité d’explorer en profondeur sa propre existence et de rechercher un sens authentique à sa vie.

Faire face

Le chemin pour devenir un individu à part entière exige que l’on ne fuie pas cet isolement, mais qu’on l’embrasse, qu’on accepte la souffrance qui l’accompagne et qu’on développe la capacité de faire face activement au sentiment d’être seul.

Notre solitude nous relie

En admettant que les autres sont tout aussi fondamentalement isolés que nous, cette solitude peut être partagée de manière à ce que l’amour compense la souffrance de l’isolement. Cette solitude existentielle alors nous relie, puisque nous sommes tous concernés par la même tragédie.

Ciel étoilé avec nuances bleutées et sombres

Jean-Paul Sartre

« L’homme est seul, sans secours, et sans espoir, et sans destinée. »

Maurice Merleau-Ponty

« Toute solitude est une solitude avec le monde. »

Carl Gustav Jung

« La solitude est le prix que nous payons pour naître conscients. »

Gros plan, lèvres rouges, cheveux noirs, flou artistique

Gaston Berger, Du prochain au semblable,

« Esquisse d’une phénoménologie de la solitude »,

in La présence d’autrui, P.U.F., 1957, pp. 88-89.

« Comment ne pas sentir (…) que cette intimité qui me protège et me définit est un obstacle définitif à toute communication ? Tout à l’heure, perdu au milieu des autres, j’existais à peine.

 

J’ai maintenant découvert la joie de me sentir vivre, mais je suis seul à la goûter. Mon âme est bien moi, mais j’y suis enfermé (…).

Les autres ne peuvent violer ma conscience, mais je ne puis leur en ouvrir l’accès, même lorsque je le souhaite le plus vivement. Mes gestes et mes paroles sont des signes sans contrepartie. Ils peuvent seulement faire allusion à une expérience que j’éprouve mais que ceux à qui je m’adresse ne pourront jamais avoir.

Mon succès apparent cachait ainsi une défaite totale. Seule la subjectivité est une existence véritable, mais elle est, par essence, incommunicable. Je suis tour seul et comme muré en moi-même – moins solitaire d’isolé. Mon jardin secret est une prison.

Je découvre en même temps que l’univers des autres m’est aussi exactement interdit que le mien est fermé. Plus encore que ma souffrance propre, c’est la souffrance d’autrui qui me révèle douloureusement notre irréductible séparation. 

Quand mon ami souffre, je puis sans doute l’aider par des gestes efficaces, je peux le réconforter par mes paroles, essayer de compenser par la douceur de ma tendresse la douleur qui le déchire.

Celle-ci pourtant me demeure toujours extérieure. Son épreuve lui reste strictement personnelle. Je souffre autant que lui, plus peut-être, mais toujours autrement que lui ; je ne suis jamais tout à fait « avec » lui.

L’expérience de la mort de l’autre est encore plus bouleversante. A cet événement exceptionnel qui anéantit celui que j’aime ou qui le transporte peut-être dans quelque autre monde où je n’ai point accès, j’assiste en étranger. Le déchirement qu’opère en moi la pensée d’une fin que je vois approcher n’est que ma tristesse. L’angoisse que j’éprouve pour la destinée de mon ami reste mon angoisse. Que  je m’applique à rendre sa mort plus douce ou plus résignée ne supprime pas le fait que l’épreuve m’en demeure interdite. On meurt comme on est né, tout seul, les autres n’y peuvent rien. Enfermé dans la souffrance, isolé dans le plaisir, solitaire dans la mort, réduit à chercher des indices ou des correspondances dont l’exactitude n’est jamais vérifiable, l’homme est condamné, par sa condition même, à ne jamais satisfaire un désir de communication auquel il ne saurait renoncer. »

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