La culpabilité
Définition
La culpabilité est un poids qui pèse sur la conscience, un mélange de sentiments d’anxiété et de tristesse causés par la connaissance du fait d’avoir fait quelque chose de mal. Elle survient souvent quand l’action d’une personne a un impact négatif sur autrui.
La culpabilité, selon Sartre, n’est pas simplement une réaction aux normes sociales ou morales externes, mais elle est intrinsèquement liée à notre propre évaluation morale. C’est un jugement que l’on porte sur nos actions à la lumière de notre propre conscience et de nos valeurs.
La honte
« La culpabilité c’est la honte de soi. » En ressentant de la culpabilité, on peut éprouver de la honte vis-à-vis de ses propres actions. La honte de soi découle du jugement que l’on porte sur ses propres choix et comportements.
« La culpabilité dit toujours : trop tard » (Friedrich Nietzsche)
Cette citation souligne l’idée que le sentiment de culpabilité est souvent lié à des actions passées, des choix ou des événements qui ont déjà eu lieu. Le « trop tard » suggère que la culpabilité se manifeste après coup, une fois que l’on prend conscience des conséquences de nos actes.
Association avec la souffrance
La culpabilité et la souffrance créent un cercle vicieux. La conscience de la faute (en agissant égoïstement par exemple, en ignorant les besoins d’autrui ou portant une irresponsabilité de l’autre/du lien) amplifie la détresse émotionnelle et contribue à la souffrance existentielle.
Je culpabilise parce que je suis libre
« La culpabilité découle directement de la liberté de l’homme. »- Karl Jasper.
Si l’homme n’était pas un être libre, il ne pourrait pas être considéré comme responsable d’un choix ni reconnu coupable. Mais comme l’homme est libre, il est responsable de ses actions, choix et valeurs. Sa culpabilité découle de cette responsabilité. C’est parce nous sommes libres de faire des choix, de créer notre propre signification dans un monde dépourvu de sens objectif que nous ressentons de l’angoisse et cette culpabilité.
Je culpabilise parce que l’autre souffre
K.Jaspers remarque que même lorsque nous avons lutté et souffert pour enfin atteindre nos buts ou assurer notre subsistance, voir l’autre se débattre dans ses propres combats et en souffrir nous donne souvent l’impression que notre satisfaction se fait au détriment du bien d’autrui. En quelque sorte, l’effort ne suffit pas à nous déculpabiliser du fait d’être heureux lorsque nous percevons que les autres ne le sont pas.
DIFFÉRENTES SOURCES DE CULPABILITÉ
Culpabilité liée à la Souffrance
La culpabilité ici découle du sentiment de satisfaction personnelle alors que d’autres souffrent, créant un conflit moral.
Culpabilité Existentielle
Cette forme de culpabilité est ancrée dans l’existence même de l’individu en tant qu’être libre. Elle émerge du fait d’avoir des choix, d’être responsable de ses actions et de ressentir le poids de la liberté individuelle.
L’individu se trouve parfois dans l’incapacité d’exercer sa liberté, d’orienter sa vie et de choisir face à l’angoisse de la liberté. Il culpabilise alors face à ses potentialités d’être qui se meurent à chaque instant, à l’appel auquel il n’arrive pas à répondre.
Culpabilité de la norme sociale
La culpabilité survient lorsque les individus se heurtent aux attentes de la société et choisissent des voies qui entrent en conflit avec ces normes. C’est le sentiment d’avoir fait quelque chose de mal, en conscience, selon des critères éthiques ou sociaux.
Culpabilité liée aux Relations Interpersonnelles
La culpabilité peut surgir lorsque les actions d’un individu ont un impact négatif sur autrui. Cela peut inclure la perception que le bonheur personnel est obtenu aux dépens du bien-être d’autrui.
Culpabilité de la sur-responsabilité
Certaines personnes se définissent comme l’unique responsable du bonheur et/ou de la souffrance de l’autre. Si l’autre souffre et n’est pas heureux, ils se sentent coupables et responsables. Leur culpabilité est alors un fardeau et une grande source de souffrance. D’une certaine manière, ils se sentent coupables d’exister.
En se rendant l’unique responsable, il nie la responsabilité personnelle de l’autre et donc sa propre liberté.
Culpabilité du “pas assez”
Certaines personnes se sentent vite coupable de ne pas en faire assez par rapport à leur travail, à leurs parents, à leurs enfants, à leur conjoint, etc. La cause de cette culpabilité est qu’ils se pensent tout puissant, qu’ils devraient pouvoir tout faire. Ils n’arrivent pas à tout faire alors ils s’en veulent, ils se sentent coupable. Ils n’acceptent pas leur vulnérabilité, leur imperfection et leur impuissance.
Culpabilité liée au collectif
La culpabilité personnelle souligne ici notre interdépendance aux autres et au monde. Notre liberté, nos choix, nos actions n’impactent pas seulement notre vie ou l’autre, mais l’ensemble de l’humanité et le monde dans lequel nous vivons.
La manière dont nous orientons notre vie personnellement, les choix que nous faisons influencent, orientent, créent le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui et demain, à chaque instant.
DONNÉES DE L’EXISTENCE
Fait existentiel
Nous sommes des êtres de relation. Exister implique et impact obligatoirement l’autre. Chaque action a des conséquences, bonnes ou mauvaises, prévues ou imprévues.
La souffrance est toujours là
Jaspers ajoute que « Chacun doit porter sa propre part ; personne n’est épargné ». Tous les humains souffrent à différents degrés, et même si nous prétendons parfois ne pas la ressentir, la souffrance est toujours là : celle de se savoir en sursis entre la vie et la mort à chaque instant, celle de se savoir impuissant face à la contingence de l’existence.
STRATÉGIE D’ÉVITEMENT DE LA CULPABILITÉ
Mauvaise foi
Sartre a introduit le concept de « mauvaise foi », décrivant la tendance de certaines personnes à nier leur propre liberté, à faire semblant de ne pas avoir le choix pour échapper à la responsabilité en attribuant leurs actions à des circonstances extérieures ou à des pressions sociales. Cela peut prendre la forme de phrases telles que « Je n’avais pas le choix » ou « C’est ce que la société attendait de moi. » Elles se perdent parfois dans des rôles préétablis et prétendent que certaines actions étaient inévitables.
Rejeter la responsabilité
Placer la responsabilité de ses actions sur les autres est une autre stratégie ni courante. Cela peut impliquer de blâmer les circonstances, les autres personnes ou même la chance pour éviter de se sentir responsable.
Se cacher derrière des normes sociales
Certains individus utilisent des normes sociales ou des règles culturelles comme justification de leurs actions, même si cela va à l’encontre de leur propre éthique personnelle. Cela peut donner un faux sentiment de légitimité à leurs choix.
Fuir la conscience
Éviter de réfléchir profondément à ses actions et à leurs conséquences est une autre stratégie. Cela peut inclure la distraction constante, l’occupation excessive ou la fuite dans des comportements compulsifs pour échapper à la réflexion introspective.
Rationaliser les actions
Justifier moralement ou intellectuellement des actions potentiellement coupables est une autre stratégie. Cela peut impliquer de trouver des arguments ou des excuses qui minimisent la gravité de l’action.
L’inaction
Certaines personnes évitent d’agir, d’exercer leur liberté afin de prévenir toute apparition de la culpabilité. Ces personnes ne réalisent pas que l’inaction est en soi une action et que la liberté ne peut être évitée. Jaspers appelle cela « action par omission » : que j’agisse ou que je refuse d’agir, c’est une forme de choix. Quoi qu’il arrive, il en résultera des conséquences correspondantes pour l’une ou l’autre position, dont je suis responsable.
L’inaction ou “l’absence de choix” ne supprime et ne réduit pas l’impact, la souffrance, la liberté et le poids de la responsabilité individuelle. Nous ne pouvons nous en libérer.
Éviter la confrontation
Certaines personnes évitent les situations ou les personnes qui pourraient les confronter à la réalité de leurs actions, en particulier si cela pourrait déclencher des sentiments de culpabilité.
Limites de ces stratégies
Ces stratégies d’évitement peuvent fournir un soulagement temporaire, mais elles peuvent également conduire à une existence inauthentique et à des conflits internes. L’existentialisme souligne l’importance de faire face à la réalité de la liberté et de la responsabilité pour vivre une vie authentique.
DISTINCTION ENTRE CULPABILITÉ AUTHENTIQUE/SAINE ET INAUTHENTIQUE/MALSAINE
Faire la distinction
La culpabilité peut être vécue de manière authentique et constructive, tandis que d’autres formes de culpabilité peuvent être perçues comme échappatoires ou nuisibles. Il est important d’avoir conscience de son authenticité, de son origine, et de son impact sur la vie individuelle et collective.
La culpabilité Inauthentique
Certains existentialistes critiquent ce qu’ils considèrent comme une culpabilité inauthentique, résultant de normes sociales ou religieuses préétablies. Si la culpabilité est imposée de l’extérieur plutôt que d’émerger de manière authentique de la liberté individuelle, elle peut être perçue comme une forme de mauvaise foi.
La culpabilité Authentique
Consiste à avoir une attitude morale authentique. Cela implique une acceptation volontaire de la responsabilité personnelle pour ses actions et leurs conséquences. La culpabilité authentique est liée à la prise de conscience de sa liberté individuelle, à la volonté de faire des choix éthiques, à la responsabilité, même si cela engendre des sentiments de culpabilité.
DISTINCTION ENTRE CULPABILITÉ AUTHENTIQUE/SAINE ET INAUTHENTIQUE/MALSAINE
Faire la distinction
La culpabilité peut être vécue de manière authentique et constructive, tandis que d’autres formes de culpabilité peuvent être perçues comme échappatoires ou nuisibles. Il est important d’avoir conscience de son authenticité, de son origine, et de son impact sur la vie individuelle et collective.
La culpabilité Inauthentique
Certains existentialistes critiquent ce qu’ils considèrent comme une culpabilité inauthentique, résultant de normes sociales ou religieuses préétablies. Si la culpabilité est imposée de l’extérieur plutôt que d’émerger de manière authentique de la liberté individuelle, elle peut être perçue comme une forme de mauvaise foi.
La culpabilité Authentique
Consiste à avoir une attitude morale authentique. Cela implique une acceptation volontaire de la responsabilité personnelle pour ses actions et leurs conséquences. La culpabilité authentique est liée à la prise de conscience de sa liberté individuelle, à la volonté de faire des choix éthiques, à la responsabilité, même si cela engendre des sentiments de culpabilité.
L’INVITATION
Attitude morale authentique
L’invitation est d’accepter en permanence la responsabilité personnelle de toutes nos actions et de leurs conséquences dans le monde comme une condition de la condition humaine.
Être authentique
Les existentialistes invitent à vivre une existence authentique. Agir en accord avec ses propres valeurs entraîne parfois des conséquences moralement difficiles, mais c’est une part incontournable de la vie authentique.
Une responsabilité partagée
Il est important d’accepter que par mon existence, en exerçant ma liberté, en faisant des choix, je crée un impact inévitable. Je suis seulement un stimulus, un déclencheur pour l’autre dont je suis responsable.
Ce qui vit l’autre (émotions, pensées, sensations, souffrance) à mon contact n’est pas de ma responsabilité. Il est de sa propre responsabilité.
Accepter son humanité
En tant qu’être humain, il est important de reconnaître que l’on est pas être tout puissant et qu’il n’est pas possible de tout faire. En tant qu’être humain, on a une grande part d’impuissance. L’accepter permet de se libérer, de ne plus se sentir coupable, de retrouver de la force pour faire ce que l’on peut/veut faire.
Défi thérapeutique ?
Gérer la culpabilité de manière saine et constructive peut être un vrai défi. Être accompagné en thérapie peut faciliter cette entreprise.
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